Aux termes de l’article 8 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».

Le regroupement familial permet à un étranger résidant en France d’y faire venir son conjoint et ses enfants mineurs, sous réserve que les conditions textuelles soient remplies.

Le regroupement familial représente l’une des principales voies d’accès au territoire français.

I. Les destinataires et conditions du regroupement familial

A. Les personnes séjournant en France

Tous les ressortissants étrangers ne peuvent pas y prétendre. Certains d’entre eux, à l’instar des Algériens et des ressortissants de pays ayant signé des accords bilatéraux avec la France, sont soumis à un régime proche. D’autres en sont complétement exclus, comme les ressortissants d’Etats membres de l’Union européenne ou assimilés, ainsi que les personnes titulaires d’une carte de résident portant mention « résident de longue durée – UE ».

Aux termes de l’article L. 411- 1 du CESEDA, le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d’un des titres d’une durée de validité d’au moins un an ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier du droit au regroupement familial.

Ces titres qui ouvrent le droit au regroupement familial sont :

– carte de résident ;

– carte de séjour pluriannuelle ;

– carte de séjour temporaire portant les mentions « salarié », « commerçant » ; « étudiant » ou « vie privée et familiale ».

B. Les membres de la famille

Le conjoint peut bénéficier du regroupement familial, à condition d’être âgé de plus de dix-huit ans. Les étrangers ayant conclu un pacte civil ne sont pas concernés par la procédure de regroupement familial et relèvent de la procédure ordinaire de délivrance des titres de séjour.

Les enfants ayant une filiation légalement établie, et âgés de moins de dix-huit ans peuvent être inclus dans la demande. Les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint dont, au jour de la demande, la filiation n’est établie qu’à l’égard du demandeur ou de son conjoint ou dont l’autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux peuvent également prétendre au regroupement familial, ainsi que les mineurs confiés, en vertu d’une décision d’une juridiction étrangère, soit au demandeur soit à son conjoint, au titre de l’exercice de l’autorité parentale.

En revanche, peuvent être exclus du regroupement familial les membres de la famille dont la présence en France constituerait une menace pour l’ordre public, ou encore un membre de la famille atteint d’une maladie inscrite au règlement sanitaire international (apprécié à l’occasion d’un examen médical. Ce dernier sera effectué soit en France et matérialisé par la remise d’un certificat médical par l’Office Français de l’Immigration et l’Intégration).

C. Les conditions du regroupement familial

Les conditions du regroupement familial sont nombreuses. Elles portent principalement sur des aspects matériels relatifs aux ressources et au logement.

La première condition porte sur le caractère stable et suffisant des ressources permettant au demandeur de subvenir aux besoins de sa famille. Toutes les ressources du demandeur et de son conjoint sont prises en considération (à l’exclusion des prestations familiales, de l’allocation équivalente à la retraite, du revenu de solidarité active, de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, de l’allocation de solidarité spécifique, et de l’allocation temporaire d’attente).

Ensuite, des conditions relatives à la salubrité et à la superficie du logement sont également posées. D’une part, le logement doit être équipé selon les critères du « confort moderne », avec un accès à l’eau potable, des toilettes et un dispositif de chauffage. D’autre part, la superficie du logement doit être adaptée au nombre de personnes appelées à s’y installer.

Enfin, le demandeur doit justifier qu’il se conforme aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d’accueil. Ainsi, l’étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulièrement en France entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans révolus et qui souhaite s’y maintenir durablement s’engage dans un parcours personnalisé d’intégration républicaine visant à favoriser son autonomie et son insertion dans la société française.

Le regroupement familial ne peut être refusé que si l’une de ces trois conditions n’est pas remplie.

II. La procédure pour bénéficier du regroupement familial

A. La demande de regroupement familial et l’instruction par les autorités

La demande de regroupement familial est rédigée à travers un formulaire CERFA, déposé auprès de l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) du département où réside le demandeur. Une attestation de dépôt est alors remise à l’intéressé.

En théorie, l’instruction de la demande ne doit pas dépasser six mois, à compter de la remise de cette attestation.

Le maire, ou un agent de l’OFII, va vérifier que les conditions du regroupement familial sont remplies. Un avis est alors rendu par le maire, que les autorités préfectorales ne sont pas obligées de suivre.

De plus, les autorités consulaires procèdent également à une instruction de la demande dans le pays où résident les futurs bénéficiaires du regroupement familial.

B. La décision des autorités préfectorales

Si le préfet admet le regroupement familial, il prend une décision qui sera notifiée au demandeur.

Le demandeur doit alors passer un test de connaissance de la langue française et des valeurs de la République, ainsi que s’acquitter d’une taxe de 99 euros par visa long séjour, c’est-à-dire un par membre de la famille concerné.

Dans un délai de trois mois à compter de la délivrance du visa, les membres de famille rejoindront la France. Passé ce délai, le visa est considéré comme caduc.

En revanche, si le préfet refuse expressément le regroupement familial, il doit motiver sa décision négative.

Il peut aussi arriver qu’il s’agisse d’une décision implicite de rejet, qui intervient en raison du silence gardé par les autorités à l’issue du délai de six mois imposé pour l’instruction de la demande.

Dans ce cas, un recours est envisageable. Il peut s’agir soit d’un recours gracieux, exercé devant le préfet ou le ministre, soit d’un recours contentieux devant le tribunal administratif.

C. La demande de carte de séjour

Les bénéficiaires du regroupement familial doivent déposer une demande de titre de séjour :

– en tant que conjoint, l’étranger doit déposer sa demande dans un délai de 2 mois.

– pour les enfants, cette demande doit être effectuée dans l’année qui suit leur accession à la majorité ou, s’ils souhaitent effectuer une formation à caractère professionnel ou travailler, entre 16 et 18 ans.

Les membres de la famille se voient délivrer une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale », qui permet au bénéficiaire de se maintenir régulièrement sur le territoire français pendant un an à compter de la date d’arrivée en France. Si le demandeur est titulaire d’une carte de résident, son conjoint a droit à une carte de résident, après trois années en France.

De plus, plusieurs accords bilatéraux lient la France à d’autres pays : l’Algérie, le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo Brazzaville, la Côte d’Ivoire, le Gabon, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Togo et la Tunisie.

Tous ces accords retiennent la même règle : l’étranger qui bénéficie du regroupement familial se voit délivrer une carte de séjour équivalente à celle dont le demandeur est titulaire en France, sans condition de délai.

III. La remise en cause du regroupement familial

Plusieurs cas de figure peuvent conduire à remettre en cause le droit au séjour des bénéficiaires et du demandeur du regroupement familial :

– la polygamie ;

– la venue en France de la famille en dehors du regroupement familial ;

– le non respect du contrat d’accueil et d’intégration ;

– la rupture de la vie commune au cours des trois années qui suivent l’admission au séjour des membres de la famille (sauf si celle-ci est due à un décès, que des enfants sont nés de cette union, sous réserve que le conjoint entré sous couvert du regroupement familial soit titulaire d’une carte de résident et qu’il contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de ces enfants et ce, depuis leur naissance, et enfin si la rupture est liée à des violences conjugales).

Ce retrait est exclu pour les catégories protégées à l’encontre des mesures d’éloignement, selon l’article L.431-3 CESEDA.

La remise en cause du regroupement familial peut déboucher sur le retrait du titre de séjour du demandeur, en cas de polygamie et en cas de contournement de la procédure, mais aussi sur le refus de délivrance ou de renouvellement des bénéficiaires du regroupement familial.